Avoir ou être
Comment vivre collectivement plus heureux ?
Concept
Erich Fromm était un psychanalyste et sociologue aux influences multiples1 qui publie en 1976 un livre2 qui met en opposition deux modes de fonctionnement :
- le mode avoir : je cherche à posséder des choses, voire des gens3
- le mode être : je cherche à devenir quelqu’un, à exprimer qui je suis
Par exemple, à partir de la révolution industrielle, nous avons cessé de nous voir comme étant avec la nature, mais comme pouvant la posséder, la maîtriser. Nous sommes passés de l’être à l’avoir.
Selon Fromm, le mode avoir me rend malheureux pour 3 raisons principales :
- je m’identifie à ce que je possède, et comme tout ce que je possède peut être perdu, ma propre existence est précaire
- j’entre en compétition pour avoir plus, et comme quelqu’un a toujours plus que moi sur un critère donné, je suis un éternel perdant
- je subis une adaptation hédonique4 qui fait que très vite après avoir obtenu quelque chose, je deviens triste et dépendant du désir d’après
A contrario, le mode être me libère pour 3 raisons :
- je prends confiance en moi et je développe une force saine, car personne ne peut me prendre ce qui est en moi
- je deviens libre d’apprécier les choses sans désirer les posséder, ce qui crée des expériences de joie mutuelle avec les autres
- je cultive mon accomplissement en exprimant ces capacités d’aimer, de raisonner, de créer et de partager, indépendamment de mes circonstances de vie
Pour lui, favoriser le « pour quoi »5 plutôt que le « quoi » va améliorer ma relation
- aux gens : fin de l’objectification et de la déshumanisation et célébration d’une expression de moi honnête et créative
- aux choses : possession responsable de ce dont j’ai vraiment besoin uniquement pour vivre
- au temps : arrêt de ma quête perdue d’avance pour en gagner ou pour le tuer
Fromm est un sociologue et partage une thèse forte sur la société à mettre en place :
- nous libérer du consumérisme et adopter une approche plus minimaliste6
- construire une nouvelle fondation collective d’un idéal partagé
- transitionner vers une démocratie participative dans laquelle les citoyens priorisent le bien public
Réaction
C’est un sujet que je trouve fondamental, intemporel, intellectuellement très attirant et pratiquement très compliqué.
Depuis quelques années, il sous-tend un certain de nombre de décision que j’ai prise, mais ça n’est pas le chemin le plus fréquenté7.
Par exemple, passer de la conception « j’ai des enfants » à « je suis père » a des conséquences multiples et profondes sur la relation que je développe avec eux et la responsabilité que cela entraîne chez moi.
Invitation
Qu’est-ce qui serait différent si je m’invitais à considérer les nombreuses facettes de ce passage de l’avoir à l’être ?
Notes & références
-
Notamment Freud, mais aussi des auteurs de philosophie pratique comme Maître Eckhart, Spinoza ou Lao Tseu. Il a d’ailleurs écrit une lecture comparée du bouddhisme zen et de la psychanalyse. E. Fromm, D. Suzuki et R. J. DeMartino, Zen Buddhism and Psychoanalysis, 1974. ↩
-
E. Fromm, To Have or to Be? The Nature of the Psyche, 1976. ↩
-
Par exemple en disant : « j’ai une femme. » ↩
-
À relire : adaptation hédonique. ↩
-
À relire : téléologie de la vie. ↩
-
À relire : bien-être et minimalisme ; acheter le bonheur ; soustraire plutôt qu’ajouter ; parentalité minimaliste ; les difficultés du monde moderne ; ressources intangibles ; utiliser les médias sociaux avec intention. ↩
-
En référence à : M. S. Peck, Le chemin le moins fréquenté : Apprendre à vivre avec la vie, 1978. ↩
Des
entités sont
référencées
(en lien avec d'autres apprenti-sages à découvrir) :
minimalisme
(19)
sens
(17)
Erich Fromm
(1)
Ce graph montre le sous-ensemble des apprenti-sages de l'almanach en lien avec celui-ci via :
- une citation directe dans les notes
- un même livre de ma bibliothèque annotée
- une entité de référence commune
Il permet de montrer la tentative de lecture synoptique que j'essaie d'avoir dans ma pratique.
Comment interagir avec le graphe de dépendance ?