(note reprise dans l'almanach : aller lire la version enrichie)
CAPI
Le pouvoir n'est pas toujours là où on le croit
Ichak Adizes1 est un consultant américain qui s’est intéressé2 à l’adaptation des entreprises aux changements permanents qui la menacent. Le changement étant permanent, l’entreprise doit prendre des décisions — les meilleures possibles — puis les exécuter — le mieux possible.
Cet apprenti-sage est consacré à la partie exécution de la décision.3
Adizes observe que la bonne exécution d’une décision nécessite le CAPI : c’est-à-dire la coalescence de l’autorité, du pouvoir et de l’influence.
Je trouve que c’est un modèle très puissant qui sépare proprement 3 notions que l’on confond souvent :
- l’autorité est le droit formel ou légal de prendre la décision4,
- le pouvoir est la capacité de permettre ou d’en bloquer l’exécution,
- l’influence est la capacité d’amener quelqu’un à faire quelque chose sans utiliser l’autorité et le pouvoir.
La première est conférée en général au leader — manager, dirigeant, etc. — mais peut aussi être collective — décision à la majorité, au consensus, au consentement, etc. Elle est, en général, assez claire pour tout le monde.
On croit que le deuxième est donné au leader, mais il est en fait donné à l’exécutant. L’autorité peut décider par exemple que le client est roi et qu’on doit le traiter de la meilleure façon possible. Si la personne au fond du centre d’appel ou à l’accueil de l’immeuble n’applique pas ces principes — délibérément ou non —, alors le client ne sera en pratique pas bien accueilli et aura une mauvaise expérience. Idem pour l’implémentation d’une fonctionnalité en développement informatique, etc.
La troisième est là où se trouve l’expertise. Les experts — internes ou consultants — apportent leurs expériences et leurs connaissances afin de faire des recommandations et d’influer sur la décision prise ou la meilleure manière de l’exécuter.
Pour moi, les leçons principales sont :
- ne pas croire qu’on a le pouvoir lorsqu’on n’a, en fait, que l’autorité,
- les modèles modernes de leadership ont tendance à favoriser l’influence plus que l’autorité — qui est de plus en plus souvent issue de l’intelligence collective,
- pour être efficient dans l’implémentation d’une stratégie, il faut aligner tout le monde autour d’une vision afin d’obtenir cette coalescence, ce CAPI.
Dans un registre intra-personnel, on pourrait presque simplifier en les mettant en relation avec des notions psychanalytiques :
- autorité = moi
- pouvoir = ça
- influence = surmoi
Autrement dit : ne négligeons pas nos freins inconscients. Et parfois, un bon coaching5 peut aider.
Enfin, un dernier sujet dans lequel je ressens particulièrement cette séparation entre A, P et I : ma relation à mes enfants, qui ont 4 et 5 ans. J’ai a priori l’autorité — même si on peut la questionner parfois. Pourtant, je n’ai clairement pas le pouvoir — malgré la frustration que cela peut m’apporter, je ne crois pas le vouloir, au fond. Il ne me reste que l’influence pour les guider vers ce que je crois être bon pour eux — sans tomber dans la manipulation. Et, au maximum, les faire participer à la décision, en se répartissant collectivement l’autorité.
Notes & références
-
J’avais parlé de lui déjà au sujet de la démocrature. ↩
-
I. K. Adizes, Mastering Change: The Power of Mutual Trust and Respect in Personal Life, Business and Society, 1992. ↩
-
J’ai partagé hier sur sur la partie prise de décision. ↩
-
Décision que l’on espère prise avec une bonne représentation du PAEI ↩
-
Il est très courant que le coaché arrive avec une décision de changement prise, mais l’incapacité à l’implémenter... ↩
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