Hugues Le Gendre

(note n°106 du )

(note reprise dans l'almanach : aller lire la version enrichie)

Derek Sivers

10 principes de cet entrepreneur-philosophe pour vivre une meilleure vie ("assez", "putain de oui", etc.)

Derek Sivers est un entrepreneur américain qui a vendu sa société il y a une douzaine d’années et a pris beaucoup de recul depuis : il endosse maintenant un rôle de mentor philosophique1. Il lit et écrit beaucoup et est très généreux dans ses partages.

Je suis tombé sur un récapitulatif2 d’une dizaine de ses grandes idées. Elles sont assez orientées business et entrepreneuriat, mais elles me font tout même réagir dans des champs parfois spirituels ou de relation interpersonnelle. J’ai ajouté directement mes commentaires en italique.

La poursuite de « assez »

L’une des grandes causes de notre souffrance est notre inaptitude à définir « assez ».

Sivers cite un poème dans lequel deux amis sont invités à une fête grandiose d’un milliardaire. L’un fait remarque que leur hôte a vraiment tout ! Et l’autre lui répond qu’il a quelque chose que son hôte n’a pas : le savoir qu’il en a assez.

J’adore cet exemple. Cette redéfinition constante de ce que « assez » représente pour moi est une vraie quête de vie, qui passe notamment par le minimalisme.

Il n’y a pas de routes, que des directions

Les chemins ne sont pas tracés... Plutôt que de passer beaucoup de temps à faire des plans très précis pour ne rien faire, il faut plutôt se mettre en chemin dans la direction qui nous appelle.

En coaching, on m’a transmis la sagesse du « prêt, feu, viser » : parfois, le plus important n’est pas d’avoir un objectif ultra-précis à atteindre, mais c’est de se mettre en mouvement. À partir de ce moment-là, le monde change déjà et notre objectif aura peut-être évolué.

Putain de oui ! putain de non

Lorsque l’on veut décider des choses importantes de la vie, Sivers nous conseille : si le choix n’est pas un grand oui, il ne faut pas y aller. Dire non à la majorité des choses, celles qui ne nous emballent pas vraiment, laisse de la place pour s’investir dans la chose plus rare qui nous motive vraiment.

J’essaie d’appliquer de plus en plus ce principe dans ma vie, mais je trouve que c’est très dur, surtout en période de disette !

Exécution, exécution, exécution

Une idée ne vaut rien tant qu’elle reste dans la tête. Elle est juste un multiplieur pour l’exécution. Et c’est le produit des deux qui peut amener à la réussite.

Ça me rappelle la parabole des potiers3 et le fait que je peux souvent construire de super plans dans ma tête, mais qui n’ont finalement pas tant de valeur que ça...

Une bonne idée est une idée achetée

La suite du point juste au-dessus. Une idée ne sera qualifiée de bonne que si elle est achetée par des gens. Pour les entrepreneurs, c’est vraiment l’idée que n’importe qui peut vous dire que votre idée est bonne, mais tant que cette personne ne paie pas, ça reste des paroles en l’air.

Tellement vrai ! C’est aussi l’idée forte du livre « The Mom test » 4 : ma mère me dira toujours que ce que je fais est très bien !

La meilleure façon de croître n’est pas de croître

Notamment, vos clients actuels n’ont pas tellement envie que vous croissiez, car cela va occuper ailleurs et vous allez moins vous intéresser à leur problème. Concentrez-vous sur eux et ils vous amèneront d’autres personnes comme eux.

C’est intéressant ça, assez paradoxal. Et d’une certaine manière, c’est assez spirituel : je me concentre sur le moment présent et le futur ira bien.

Excluez

La suite du point juste au-dessus. N’essayez pas d’être tout pour tout le monde. Lorsque vos clients savent que vous excluez 99 % de vos cibles, et qu’ils font partie des 1 %, ils se rapprochent autant de vous. C’est un jeu à long terme. Personne ne veut être dans une boîte de nuit qui accueille tout le monde.

Ce truc-là me titille. Car, au fond, je n’ai pas envie de rejeter qui que ce soit. Mais, en prenant un peu recul, je vois qu’il ne s’agit pas de rejeter des gens — s’ils viennent, je peux toujours les accepter — mais plutôt de pas activement aller chercher tout le monde. Ça résonne avec un autre champ, bien exprimé par Saint-Exupéry : « la perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer ».

Il n’y a pas de bonne façon de faire

Rien ne se passe comme prévu. Il faut être prêt à essayer de plein de façons différentes.

Il est bon de cultiver activement de nombreux points de vue sur la vie — notamment pour éviter les défauts de la loi de la proximité5 — afin de ne pas s’effondrer si le point de vue principal devient obsolète.

Auto-destruction

L’objectif est de servir un besoin. Si celui-ci disparaît, tant mieux ! Vos clients ont une vie meilleure. Passez à autre chose, n’essayez pas de vous accrocher.

Il faut apprendre à « tirer, et relâcher. » 6 Et programmer sa disparition. Au-delà du « memento mori » — souviens-toi que tu vas mourir — des stoïciens7, ça parle aussi de permaculture de la vie8 : mon job dans la vie est de l’améliorer un peu d’ici à ma sortie.

La loi inverse de l’argent

Lorsque quelqu’un fait les choses pour l’argent, on le sent, tout comme on sent un amoureux épris et désespéré. Ça repousse : on veut donner à des gens qui donnent.

Ça me parle pas mal, ça. Qu’on croit au karma — ou bien à la « loi d’attraction » — ou non, je me dis qu’au fond, c’est dans le don qu’on réussit. Et en tout cas, ça nous rend plus heureux9.

Il y a une personne derrière un profil

Derrière chaque interaction distancée — à travers les réseaux sociaux, dans les embouteillages — on peut avoir tendance à être beaucoup plus dur que si la personne était à côté de nous. N’oublions pas que derrière, il y a une personne aussi. Plaçons-la mentalement à côté de nous afin de peut-être mieux la traiter.

Ça résonne très fort au sujet de la voiture. C’est le seul endroit où j’arrive à m’énerver très fortement contre des gens, et je suis sûr que la protection en acier de la carrosserie de ma voiture y est pour quelque chose. La prochaine fois, je vais essayer de placer mentalement l’autre conducteur sur le siège du passager... on verra si ça me calme !

Notes & références

  1. On peut lire ses écrits ici.

  2. Publié par Brendan Cahill sur son site.

  3. J’ai déjà écrit sur la parabole des potiers.

  4. Un bon livre sur le sujet : R. Fitzpatrick, The Mom Test: How to talk to customers & learn if your business is a good idea when everyone is lying to you, 2019.

  5. Cette loi dit d’une certaine manière qu’on est la moyenne des 5 personnes qu’on côtoie le plus.

  6. J’ai déjà parlé de ce sujet, ô combien central dans ma vie.

  7. J’ai abordé ce salutaire exercice stoïcien au sujet du principe d’inversion

  8. La permaculture de la vie est un sujet qui m’est cher.

  9. On l’a vu il y a quelques jours, à propos d’acheter le bonheur.

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Je m'appelle Hugues Le Gendre et je convertis les problèmes complexes de mes clients en opportunités d'agir autement et de nous transformer (eux et moi).

Mes notes d'apprenti-sage sont la collection des petites choses du quotidien qui me nourrissent, modifient mes modèles mentaux, affinent ma philosophie de vie et me guident sur mon chemin d'apprenti-sage.

Une partie d'entre elles a été réunie dans un almanach : une invitation quotidienne au développement personnel et professionnel. En partageant des théories et des pratiques, documentées précisément et mises en lien avec la vraie vie, et en posant une question importante par jour, il contribue à devenir plus conscient⸱e, s'examiner honnêtement et actualiser sa propre philosophie de vie. En tout cas, ça en a été l'effet sur moi et sur des milliers de lecteurs depuis que je publie mon journal !
Il donne aussi une idée de ce que je cherche à insuffler dans mes interventions.

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