Hugues Le Gendre

(almanach n°37 du )

Empathie

Comment définir l'empathie sur plusieurs plans ?

Ces jours-ci, j’écris autour du sujet de l’empathie et ce qu’elle permet.1

Concept

Plutôt que donner une définition de l’empathie, j’ai envie d’en citer plusieurs, car le concept d’empathie embarque finalement beaucoup de choses et parle de façon différente à chacun.

Une définition psychologique :

L’empathie ou la compréhension empathique consiste en la perception correcte du cadre de référence d’autrui avec les harmoniques subjectives et les valeurs personnelles qui s’y rattachent.

Percevoir de manière empathique, c’est percevoir le monde subjectif d’autrui « comme si » on était cette personne — sans toutefois jamais perdre de vue qu’il s’agit d’une situation analogue, « comme si ».

La capacité empathique implique donc que, par exemple, on éprouve la peine ou le plaisir d’autrui comme il l’éprouve, et qu’on en perçoive la cause comme il la perçoit (c’est-à-dire qu’on explique ses sentiments ou ses perceptions comme il se les explique), sans jamais oublier qu’il s’agit des expériences et des perceptions de l’autre. Si cette dernière condition est absente, ou cesse de jouer, il ne s’agit plus d’empathie, mais d’identification.

– Carl Rogers2

Une définition philosophique :

L’empathie véritable exige que l’on écoute de tout son être. L’écoute exclusivement auditive est une chose. L’écoute intellectuelle en est une autre. Mais l’écoute de l’esprit ne se limite pas à une seule faculté — l’audition ou la compréhension intellectuelle. Elle requiert un état de vacuité de toutes les facultés. Lorsque cet état est atteint, l’être tout entier est à l’écoute. On parvient alors à saisir directement ce qui est là, devant soi, ce qui ne peut jamais être entendu par l’oreille ou compris par l’esprit.

– Tchouang Tseu

Une définition « communication non violente »3 :

L’empathie est un 6e sens avec lequel nous percevons l’énergie des émotions, au même titre que nos yeux perçoivent la lumière. (...)

Pour résumer, nous pourrions dire que la personne qui écoute avec empathie est comme un miroir : elle accueille et réfléchit ce qui lui est présenté, sans chercher à modifier l’information. Ou encore : elle est à l’image d’une roue de moulin qui, lorsque le courant de la rivière s’écoule dans ses aubes, tourne sans se poser de questions, sans se demander si la rivière devrait couler plus ou moins vite, mais adopte une vitesse proportionnée à la force du courant.

– Jean-Philippe Faure & Céline Girardet4

Une définition poétique :

Dans l’empathie, on peut prendre soin de l’autre comme jamais il ne prendra soin de lui-même, par une attention qui est tendue comme un rai de lumière, mais il n’y a aucune emprise psychique sur lui.

C’est l’art double de la plus grande proximité, et de la distance sacrée. (...)

La limite de l’empathie, c’est la fusion, qui est de l’entre-dévorement.

– Christian Bobin5

Une définition métaphorique :

L’empathie, c’est tendre la main à celui qui est dans le trou, ce n’est pas sauter dedans pour l’aider à remonter.

– Agnès Ledig6

Une définition anatomique :

Être empathique, ce n’est ni déduire, ni penser, ni voir, ni entendre les émotions des autres... l’empathie est en fait un sixième sens avec lequel nous percevons l’énergie des émotions, au même titre que nos yeux perçoivent la lumière.

– Claude Steiner7

Une double définition :

L’empathie comporte deux aspects, l’un affectif, l’autre cognitif.
L’empathie affective est la capacité d’entrer en résonance émotionnelle avec les sentiments de quelqu’un d’autre, de prendre ainsi conscience de sa situation. Si l’autre est joyeux, je ressens moi-même une certaine joie. S’il souffre, je souffre de sa souffrance. L’empathie affective nous alerte donc sur la nature et l’intensité des sentiments d’autrui, la souffrance surtout.
L’empathie cognitive consiste à se mettre à la place de l’autre — qu’est-ce que je ressentirais si je souffrais de famine ou si j’étais torturé en prison ? — ou à imaginer ce qu’il ressent, sans pour autant ressentir la même chose.

– Christophe André8

Réaction

Chacune de ces définitions me parle à un niveau différent.

Elles me permettent aussi de faire le tri entre trois notions souvent confondues :

Invitation

Qu’est-ce qui serait différent si j’interrogeais sur chacune de ces définitions pour voir celle qui résonne le plus ?

Notes & références

  1. Les idées sont tirées d’une mini-formation que j’ai donnée plusieurs fois à EDF en 2019. J’en donne régulièrement sur des sujets de développement personnel et professionnel.

  2. C. Rogers, G. Kinget, A. de Peretti et A. Botteman, Psychothérapie et relations humaines, théorie de la thérapie centrée sur la personne, 2009.

  3. Nous parlerons demain de ce qu’est la communication non violente et de la place de l’empathie dans ce processus.

  4. J.-P. Faure et C. Girardet, L'empathie, le pouvoir de l'accueil, 2013.

  5. C. Bobin et L. Dattas, La lumière du monde, 2001.

  6. A. Ledig, Juste avant le bonheur, 2014.

  7. C. Steiner, P. Perry et F. Olivier, L’ABC des émotions : développer son intelligence émotionnelle, 2000.

  8. C. André, A. Jollien, M. Ricard et C. Meyer, Trois amis en quête de sagesse, 2015.

Des entités sont référencées (en lien avec d'autres apprenti-sages à découvrir) :
Alexandre Jollien (8) empathie (18) Christian Bobin (6) Carl Rogers (3) Tchouang Tseu (1) Jean-Philippe Faure (1) Céline Girardet (1) Agnès Ledig (1) Claude Steiner (1) Christophe André (1)

Ce graph montre le sous-ensemble des apprenti-sages de l'almanach en lien avec celui-ci via :

Il permet de montrer la tentative de lecture synoptique que j'essaie d'avoir dans ma pratique.

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Comment interagir avec le graphe de dépendance ?

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Je m'appelle Hugues Le Gendre et je convertis les problèmes complexes de mes clients en opportunités d'agir autement et de nous transformer (eux et moi).

L'almanach Apprenti-sage est une invitation quotidienne au développement personnel et professionnel. En partageant des théories et des pratiques, documentées précisément et mises en lien avec la vraie vie, et en posant une question importante par jour, il contribue à devenir plus conscient⸱e, s'examiner honnêtement et actualiser sa propre philosophie de vie. En tout cas, ça en a été l'effet sur moi et sur des milliers de lecteurs depuis que je publie mon journal !
Il donne aussi une idée de ce que je cherche à insuffler dans mes interventions.