(note reprise dans l'almanach : aller lire la version enrichie)
Loi de la région commune
Le lieu fait-il le groupe ? Que partageons-nous de plus fort encore ? -- #UX 6/20
Cet apprenti-sage fait partie d’une série où j’explore la transposition de lois de l’UX design1 à la relation intra- et interpersonnelle — notamment dans le contexte du coaching.
Dans le contexte de l’UX, cette loi dit2 :
Des éléments tendent à être perçus comme faisant partie d’un groupe lorsqu’ils partagent une zone avec une frontière bien définie
Le regroupement d’individus dans une même zone définie peut avoir beaucoup d’origine. En fonction de la nature de cette origine, les impacts sur le groupe n’ont pas la même profondeur.
En prenant l’exemple du modèle des niveaux logiques de la pensée de Dilts3 et en partant du bas de la pyramide, on peut estimer à quel point le groupe est compact, à quel point il arrive à une identité commune :
- (environnement) si les gens se retrouvent dans le même lieu pour des raisons arbitraires et différentes, alors le groupe aura une compacité faible. Il est difficile de trouver un exemple car les gens ont finalement une raison, même lointaine, de se trouver à un endroit précis.4
- (comportement) lorsque les gens se retrouvent dans un même lieu parce qu’ils ont un comportement en commun, alors le groupe commencera déjà à avoir une existence mieux définie. Par exemple, les gens qui se retrouvent en cellule de dégrisement une même nuit auront tous abusé d’une substance « incapacitante » même si leurs raisons ou leur origine peuvent être très différentes.
- (capacité/compétence) lorsque les gens se retrouvent ensemble parce qu’ils ont une compétence en commun, le groupe est déjà beaucoup visible. Les gens se retrouvant pour une conférence thématique pointue vont naturellement entrer plus facilement en relation, pouvant au moins discuter de leur pratique.
- (croyance/valeur) lorsque les gens se retrouvent dans un même lieu parce qu’ils croient la même chose, alors le sentiment d’appartenance à un groupe est beaucoup fort. C’est le cas de personnes se retrouvant pour manifester pour une cause commune. Ils croient en cette cause et ils croient à l’importance de manifester.
- (identité) lorsque des gens sont au même endroit car ils ont en commun une partie d’eux-même, alors le groupe est évident et fort. C’est le cas d’une famille ou de certains groupes identitaires.
Certes ces exemples peuvent paraître un peu caricaturaux. C’est parce que je trouve difficile d’isoler sur un groupe l’influence unique d’un niveau logique. Il a tendance à déborder sur le niveau du dessus et évidemment sur le niveau du dessous.
À la lumière de cette analyse, où se trouvent les collègues d’une même organisation ?
Cela va dépendre, notamment de la culture du groupe et de l’organisation. S’ils ne partagent qu’un bureau et rien d’autre, le groupe sera assez peu dense. Mais en fait, très vite une culture du bureau peut se mettre en place et d’autres choses plus profondes vont s’aligner.
C’est souvent une raison pour laquelle je suis sollicité pour faire des coachings d’équipe.
C’est très présent lorsque les programmes RH de simplification des pyramides sont passés — notamment dans certaines organisations qui se disent « agiles » — et qu’on se retrouve avec des équipes fragmentées dont la dynamique est parfois dysfonctionnelle. Nous prenons alors le temps de remonter ensemble les niveaux logiques et d’aller explorer puis souligner ce qu’ils ont en commun, au-delà du bureau qu’ils partagent.
Une culture d’organisation forte va avoir tendance à aligner un certain nombre de niveaux logiques.
Mais du coup, comment préserve-t-on la diversité dans ce cas ? Comment ne tombe-t-on pas dans la standardisation/normalisation des comportements et des croyances ? Comment garder la richesse de la spécificité de chacun ?
Je crois que la clé se trouve dans la volonté de se retrouver sur le haut des niveaux logiques, principalement les valeurs, et de laisser le bas vivre et bouger naturellement.
L’alignement doit être vertical — entre les valeurs et les comportements d’une même personne — mais pas horizontal — entre les comportements de chacun. Souvenons nous que Robin des Bois et le juge qui voudrait le mettre en prison partagent la même valeur de justice.
Notes & références
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L’UX (qui vient de l’anglais User eXperience) est l’expérience que l’utilisateur a en interagissant avec un produit/service. et l’UX design est la conception de telles expériences satisfaisantes ↩
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Pour ceux qui ne connaissent pas, voir l’introduction au modèle ↩
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J’ai commencé par me dire que des gens présents dans une même rue à un même moment pourraient appartenir à ce groupe, mais il y a probablement une raison commune à cette présence — c’est un quartier avec lequel ils ont une attache. En essayant d’ajouter le hasard, je me suis dit que les gagnants d’une loterie seraient dans un tel groupe mais ils ont partagé à un moment l’envie de jouer ou la croyance qu’ils pouvaient gagner. Peut-être un jury tiré au sort dans la population pour des assises ? Le groupe est peu compact initialement mais ils vont partager la tâche de rendre un verdict et donc quelque chose de plus fort va vite prendre le dessus... ↩
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