Cet autre sans visage
Comment je fais n'importe quoi à créer pour n'importe qui ?
Concept
Sarvasv Kulpati est un créateur dans le contexte tech : il écrit, produit des vidéos, etc.
Il a parfois des difficultés dans ce contexte et se pose souvent des questions presque existentielles sur ce qu’il écrit. Que vont en penser les gens ? Vont-ils être intéressés ? Quelles parties devrais-je garder ou enlever ? Sur quel sujet devrais-je écrire ? Quand il veut lancer un projet, il pense de façon exhaustive à toutes les fonctionnalités qu’il pourrait intégrer pour satisfaire tout le monde...
Pour lui1, tous ces problèmes ont la même source : créer pour un groupe imaginaire de personnes que je ne connais pas bien et que je ne définis pas bien. Il l’appelle cet autre sans visage. Et je vais utiliser ce groupe, créé de toute pièce dans ma tête, pour juger ce que je fais, sans savoir précisément ce qu’il cherche. Je vais lui donner un pouvoir, parfois démesuré, sur moi.
Comme ses besoins ou ses problèmes ne sont pas clairs, je vais tourner en rond dans ce que je crée pour lui. Finalement, si je crée pour cet autre sans visage, je ne crée pour personne, et cela ne génère en moi que de la confusion et de l’anxiété. C’est encore pire si je vais plus loin que simplement créer pour lui et que je décide de vivre pour lui !
Kulpati conseille d’approcher le sujet en créant une audience ultra-spécifique, représentée par une personne que je connais bien, potentiellement moi-même. Elle a des objectifs spécifiques et mesurables et je peux en obtenir du feedback. Dans le jargon UX2, on parle d’un persona précis, mais Kulpati va plus loin en essayant d’en trouver une incarnation réelle et de créer ainsi une audience d’une personne.
Réaction
C’est une expérience qui résonne beaucoup chez moi, notamment sur mon initiative Champs Libres et en particulier Psychologie du code3.
Dès que je suis incapable de déterminer si ce que j’ai fait marche bien ou convient bien ou a de la valeur, c’est que j’ai été baladé par cet autre sans visage. Il faut ignorer cette voix et se concentrer sur celle qui compte.
La transposition version développement personnel de cette idée donne la même chose : faire les choses pour les autres, et plus encore pour un anonyme autre dont je subis les injonctions — la société, la culture, etc. — a peu de chance de mener à l’épanouissement...
Ainsi, la vie devient plus calme, moins anxieuse et les décisions deviennent plus faciles à prendre.
Finalement, dans le cas où je déciderais de devenir mon propre persona, il s’agit de prêter attention à ce que je ressens, plus qu’à cette petite voix dans ma tête. C’est une manière d’arrêter de me raconter des histoires et de commencer à créer quelque chose qui est aligné.
Invitation
Qu’est-ce qui serait différent si je mettais un visage précis à cet autre ?
Notes & références
-
Lire l’article original (en anglais). ↩
-
À relire : lois de l’UX. ↩
-
Plus d’information sur Champs Libres et sur Psychologie du code. ↩
Des
entités sont
référencées
(en lien avec d'autres apprenti-sages à découvrir) :
Sarvasv Kulpati
(1)
audience
(1)
Ce graph montre le sous-ensemble des apprenti-sages de l'almanach en lien avec celui-ci via :
- une citation directe dans les notes
- un même livre de ma bibliothèque annotée
- une entité de référence commune
Il permet de montrer la tentative de lecture synoptique que j'essaie d'avoir dans ma pratique.
Comment interagir avec le graphe de dépendance ?