Hugues Le Gendre

(note n°183 du )

(note reprise dans l'almanach : aller lire la version enrichie)

Effet de leurre

Biais cognitif -- une 3e option bien construite peut changer la préférence entre les 2 autres

Dans la série1 mon cerveau me joue des tours2, rubrique mes biais cognitifs, je demande l’effet de leurre.

Très utilisé en marketing, il postule que dans un choix entre deux options, l’introduction d’une troisième option asymétriquement dominée — le leurre — peut modifier substantiellement le rapport de préférence entre les deux premières. Cette caractéristique caractérise le fait qu’elle est moins intéressante en tout point à l’option que l’on cherche à pousser et seulement sur quelques points à celle que l’on cherche à minimiser.

Ce leurre est donc un moyen simple de manipuler le choix des consommateurs afin de les pousser vers une option plutôt qu’une autre, en créant une forme d’ancrage3.

Pour le comprendre facilement, l’expérience4 des prix de souscription au magazine The Economist est criante. Les trois options étaient les suivantes :

Dans ce cas de figure, les clients testés choisissent la première option à 16 %, la seconde à 0 % et la dernière à 84 %. Les clients du groupe à qui on ne présentait pas l’option Papier seulement choisissaient la première option à 68 % et la dernière à 32 %. Ainsi, l’introduction du leurre qu’est l’option n° 2, même si elle ne récolte aucun intérêt, a poussé fortement les clients à choisir l’option la plus chère !

Je pense qu’on utilise parfois inconsciemment cet effet de leurre lorsqu’on post-rationalise un choix passé, lorsqu’on essaie de se convaincre qu’on a fait le bon choix. Notre égo étant mal à l’aise avec notre propre incohérence, il doit probablement construire des mécaniques de ce style afin de ne pas trop se remettre en question.

Je n’utiliserai pas cette méthode, clairement manipulatrice, sur quelqu’un dans le cadre d’un coaching. Mais je m’interroge sur la possibilité d’utiliser cet effet sur moi-même, en autocoaching, afin de m’aider à résoudre un dilemme... À essayer !

En tout cas, j’essaierai dorénavant de le détecter plus finement dans les offres commerciales qu’on me propose, ainsi que dans mon propre comportement.

Notes & références

  1. J’essaie de documenter différents biais cognitifs, une fois par semaine, un peu comme je l’avais fait pour les lois de l’UX.

  2. Cette expression est inspirée du livre : A. Moukheiber, Votre cerveau vous joue des tours, 2019. On me l’a chaudement recommandé. Je ne l’ai pas encore lu, mais ce podcast, avec le philosophe Charles Pépin, est à écouter. Édit. : c’est maintenant fait.

  3. À relire : biais d’ancrage.

  4. Dan Ariely, Predictably Irrational : The Hidden Forces that Shape Our Decisions, 2009.

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Je m'appelle Hugues Le Gendre et je convertis les problèmes complexes de mes clients en opportunités d'agir autement et de nous transformer (eux et moi).

Mes notes d'apprenti-sage sont la collection des petites choses du quotidien qui me nourrissent, modifient mes modèles mentaux, affinent ma philosophie de vie et me guident sur mon chemin d'apprenti-sage.

Une partie d'entre elles a été réunie dans un almanach : une invitation quotidienne au développement personnel et professionnel. En partageant des théories et des pratiques, documentées précisément et mises en lien avec la vraie vie, et en posant une question importante par jour, il contribue à devenir plus conscient⸱e, s'examiner honnêtement et actualiser sa propre philosophie de vie. En tout cas, ça en a été l'effet sur moi et sur des milliers de lecteurs depuis que je publie mon journal !
Il donne aussi une idée de ce que je cherche à insuffler dans mes interventions.

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