(note reprise dans l'almanach : aller lire la version enrichie)
Jugement social
La matrice chaleur/compétence éclaire sur la façon dont je juge et je suis jugé
Lorsque je juge ou perçois une personne ou un groupe, je m’intéresserais principalement à ses qualités et à ses défauts, à ses forces et à ses faiblesses. Afin d’être en mesure de me forger rapidement une impression informant le futur de nos interactions, je m’appuierais principalement sur deux dimensions :
- chaleur : la personne est-elle sympathique, honnête vs froide, hypocrite
- compétence : la personne est-elle compétente, déterminée vs incompétente, paresseuse
Des dizaines d’études ont traité du sujet, mais j’en ai trouvé une1 résumant bien le sujet et citant des dizaines de sources.
Ces deux dimensions sont importantes, car d’un point de vue très primaire et proche des stratégies de survie2, elles répondent à une double question fondamentale : la personne a-t-elle de mauvaises intentions à mon égard et est-elle capable de les réaliser ?
Je ne rentre pas dans le biais énorme qui est présent : tout ceci repose uniquement sur ma perception et mes suppositions et pas sur la vérité. Plus précisément, il a été observé3 que je vais juger la chaleur sur l’intention et la compétence sur le résultat. Donc je suis évidemment assez peu précis sur la première dimension et trop spécifique sur la seconde.
En revanche, l’approche est pragmatique. La question sur la chaleur vient en premier. La question sur la compétence vient ensuite, en fonction de la réponse à la première question.
Ces deux dimensions forment une matrice d’interprétation qu’il est utile de garder en tête. La chercheuse Heidi Grant Halvorson en propose une version illustrée4 par l’exemple des Simpsons qui a créé un bel ancrage pour moi :
FROID | CHAUD | |
---|---|---|
COMPÉTENT | Monty Burns{{< br >}}veut peut-être vous faire du mal et a sûrement les moyens de le faire | Lisa Simpson{{< br >}}serviable et intelligente |
INCOMPÉTENT | Moe Szyslak{{< br >}}veut peut-être vous faire du mal, mais n’est pas assez doué pour le faire | Homer Simpson{{< br >}}personne adorable que vous ne voudriez dans votre équipe pour rien au monde |
Sans entrer dans trop de détails, il existe une autre grande version de cette matrice avec deux dimensions proches :
- la communalité, qui est le reflet de l’existence d’un organisme en tant que membre d’un collectif et se manifeste par le sens de l’unité et de la coopération avec les autres individus
- l’agentisme, qui se réfère au mode d’existence d’un organisme en tant qu’individu séparé et se manifeste par la différenciation, le contrôle et par l’affirmation et l’expansion du soi
A priori, ces dimensions sont deux principes organisateurs très généraux des phénomènes humains et donnent un regard moins « orthogonal » aux dimensions. On voit apparaître un lien entre affirmation du soi et respect du groupe. Le second agit ainsi comme un garde-fou du premier.
Au-delà de l’intérêt purement intellectuel de ce modèle pour moi, quelle qu’en soit sa version, il m’invite à observer ce que je projette sur ces deux dimensions vis-à-vis de mes relations, de mes clients, de mes prospects. Je trouve que c’est aussi une clé d’entrée importante pour l’accompagnement en coaching. Même si des exemples récents me montrent qu’on peut être perçu comme chaleureux et compétent sans pour autant que cela fonctionne vraiment, car il y a un autre facteur qui joue : l’adéquation entre ce que je propose et que dont l’autre a besoin.
Notes & références
-
A. Carrier, E. Louvet et O. Rohmer, « Compétence et agentisme dans le jugement social », Revue internationale de psychologie sociale, 2014, 27 (1), p 95-125. ↩
-
À relire : stratégies de survie. ↩
-
B. Wojciszke, « Multiple meanings of behavior: Construing actions in terms of competence or morality », Journal of Personality and Social Psychology, 1994, 67 (2), p 222-232. ↩
-
Lire l’article et l’illustration en anglais. ↩
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